Quel est le rôle des objets frontières dans le renforcement des communautés de pratique ? Tama Rchika est intervenue dans le cadre des 7ème journées Georges Doriot 2018 à Montréal (ESG UQAM)

Tous les deux ans, les journées Georges Doriot sont l’occasion de mettre en pratique trois principes forts :

  • L’intelligence pratique : l’entrepreneuriat est un champ où l’imbrication entre les pratiques et les réflexions académiques est nécessaire et fructueuse.
  • Une vocation transdisciplinaire : ces journées doivent permettre d’aborder les phénomènes entrepreneuriaux sous diverses facettes : managériale, juridique, psychologique, historique, etc.
  • La relation entre entrepreneuriat et société : les journées Doriot souhaitent mettre l’accent sur l’entrepreneuriat comme agent des transformations sociales et non réduire l’entrepreneuriat à la création de richesse.

Sur le thème de « l’entre-prendre » et du partage, les journées Georges Doriot s’interrogeait, cette année, sur le potentiel de la transformation sociale dans le cadre de l’entrepreunariat. L’objectif de ces journées était d’aller au-delà de la critique pour mettre en débat des conceptions alternatives de l’entrepreneuriat qui considèrent davantage les dimensions sociales, transformatives et relationnelles de l’entrepreneuriat, qu’il soit ou non marchand. En somme, cette conférence visait à porter l’attention de la communauté sur l’ENTRE des dynamiques entrepreneuriales.

C’est dans le cadre de l’atelier « Entrepreneuriat, Nouvelles Formes d’Organisation du Travail et Nouveaux Espaces » que Tama Rchika a présenté un de ses axes de recherche : Le rôle des objets frontières dans le renforcement des communautés de pratiques entrepreunariales. Dans le cadre de cette réflexion, elle s’est dès lors interrogée sur base des premiers résultats issus de son travail de terrain. Ainsi, au cours d’une observation participante menée au sein du Ouishare Fest[1] de Paris en juillet 2017, il lui était apparu que ce collectif d’entrepreneurs était à la fois hétérogène tout en correspondant effectivement à une communauté de pratique (Wenger, & Lave, 1988). Dès lors, elle s’est intéressée à cette tension liée à la double nécessité de conserver la communauté Ouishare tout en prenant compte l’hétérogénéité de ses membres. C’est ainsi qu’elle a proposé de renforcer la théorie des communautés de pratique, traitant peu de la notion d’hétérogénéité, par le concept analytique de l’objet frontière (Star, & Griesemer, 1989), un arrangement permettant de répondre à la tension issue du besoin de coopérer et de l’existence de mondes sociaux différents.

 

Pour mener à bien sa présentation, elle est ainsi revenue sur la description de Ouishare et de son observation participante durant le Ouishare Fest. Ensuite, elle a marqué un retour théorique à la fois sur la notion de communautés de pratique et ensuite, sur celle d’objet frontière. Elle a alors démontré que Ouishare correspondait effectivement, sur base de trois dimensions centrales, à une communauté de pratique :

 

  1. Engagement des individus dans des actions dont ils négocient le sens (Wenger, & Lave, 1988) ;
  2. Accueil et formation des nouveaux venus ainsi que développement d’une identité commune (Daele, 2009) ;
  3. Développement d’un répertoire constitué de ressources (histoires, symboles, rituels, etc.).

 

Elle a alors mis en avant la particularité de Ouishare d’être, plus spécifiquement, une méta-communauté de pratique composée d’ensemble locaux. Ce constat l’a alors conduite à s’interroger sur la capacité de Ouishare à dépasser la limite engendrée par l’hétérogénéité inhérente à son collectif de sorte à ce que la dimension locale ne l’emporte pas sur le niveau global. C’est dans ce cadre qu’est arrivée la notion d’objet frontière comme réponse au besoin de cohérence entre ces groupes hétérogènes par la création de « ponts » (Star, & Griesemer, 1989).

[1] http://ouisharefest.com/.