Le rôle de l’objet-frontière dans la constitution des pratiques collaboratives intra- et intercommunautés.

Par Rama Rchika

Tama Rchika est assistante de recherche et doctorante à l’Institut Langage et communication (ILC). Sous la direction de François Lambotte (UCLouvain, LASCO) et de Damien Renard (UCLouvain, LASCO), son projet de thèse s’interroge sur le rôle des objets-frontière dans la constitution de pratiques collaboratives intra- et inter communautés. Plus particulièrement, il s’agit d’étudier la manière dont les plateformes numériques développent et maintiennent une logique collaborative entre différents mondes sociaux dans le but de créer une valeur ajoutée.

Résumé

Avec le développement des technologies de l’information et de la communication, les dispositifs numériques se sont multipliés, facilitant l’échange et le partage de ressources. Actuellement, nous observons ainsi une émergence croissante de plateformes rassemblant des acteurs très hétérogènes et stimulant de nouvelles formes de pratiques entrepreunariales : développement de projets (UpCampus), valorisation de l’impact social (MakeSense), détection des plus récentes innovations (SoonSoonSoon), partage de connaissances (Enspiral), etc. Se présentant comme supports « d’intelligence collective » (Malone et al., 2009), ces plateformes visent le développement de collaborations entre des acteurs poursuivant des objectifs complémentaires et/ou antagonistes. Néanmoins, un de leurs enjeux réside encore dans la mobilisation des individus à réellement collaborer.

La création de communauté étant fondamentale dans le processus de création de valeur (Asselineau et al., 2014), il s’agit d’étudier en quoi ces plateformes constituent des

communautés de pratique au sein desquelles les membres partagent un domaine d’intérêt, développent des habitudes d’entraide et de diffusion de ressources et créent une pratique commune s’appuyant sur leurs expériences et récits (Wenger, 2011). Les communautés de pratique émergeant « naturellement » (Wenger, 1998), le projet de recherche s’est tourné vers la notion d’objet-frontière comme participant à la construction et au renforcement de celles-ci. En effet, ces objets ont pour particularité de rassembler des individus issus de divers « mondes sociaux » et de leur permettre de travailler ensemble sans nécessité de « consensus préalable (Star, 2010 : 19). Pour collaborer, les individus doivent donc réussir à se comprendre et à établir une communication cohérente. Par ailleurs, ces objets développent des frontières communes à plusieurs groupes grâce à une certaine « flexibilité » et à un partage de structure, devenant des « ingrédients de l’action » (id. : 20). En outre, ils créent des « ponts » entre différents « mondes sociaux » (Star, & Griesemer, 1989 : 414) et facilitent les échanges.

Une autre de leurs caractéristiques majeures est qu’ils sont faiblement structurés en usage commun mais fortement structurés en usage individuel (id. : 394). Autrement dit, ils ont des significations différentes selon le « monde social » (id.), mais leur structure est suffisamment commune à plus d’un monde pour maintenir leur propre identité et devenir des moyens de traduction.

Cherchant à comprendre comment les plateformes numériques peuvent renforcer la collaboration entre ses utilisateurs, la chercheuse étudie en quoi les objets-frontière aident à la construction et au développement d’une communauté de pratique et dès lors, à la constitution de pratiques collaboratives intra- et inter communautés. Plus spécifiquement, elle interroge, d’une part, les plateformes numériques en tant que communautés de pratique et d’autre part, considère le rôle des objets-frontière dans le cadre de leurs pratiques collaboratives.

Par ailleurs…

En octobre 2016, Tama a commencé à travailler sur un projet de recherche Innoviris visant à stimuler les pratiques collaboratives au sein du tissu économique bruxellois (EPRACO). Dans le cadre d’une collaboration entre l’ULB et l’UCL, ce projet étudie les différentes initiatives entrepreneuriales bruxelloises. En s’appuyant sur une étude des pratiques collaboratives existantes sur différentes plateformes, il vise ainsi à renforcer le tissu collaboratif à Bruxelles.

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