Visualisation de données et design émotionnel peuvent-ils se conjuguer ?

La visualisation de données et le design émotionnel peuvent-ils se conjuguer ? Tiffany Andry y répond au 86ème Congrès de l’ACFAS

Au Québec, chaque année, L'Association francophone pour le savoir (ACFAS) organise son congrès, réunissant un ensemble de scientifiques francophones aux disciplines diverses et variées. Son objectif est de contribuer à l'avancement des sciences au Québec et dans la francophonie canadienne, en favorisant la diffusion des résultats de recherche.

Le 86ème Congrès de l'ACFAS s'est tenu à l'Université du Québec à Chicoutimidu 7 au 11 mai 2018, où Tiffany Andry a été reçue dans l'un des 118 colloques organisés. Dans le colloque n°421 du 10 mai, intitulé "Les affects numériques : production, circulation et marchandisation", elle a traité la question de la visualisation de données et du design émotionnel, en parcourant ses premiers résultats de recherche. Ce colloque a donc abordé le tournant affectif et émotionnel du web, et plus largement de l'économie du numérique, en s'interrogeant, entre autres : "En quoi les dispositifs numériques permettent-ils réellement de produire et de faire circuler des affects ou émotions ?"

La journée s'est ainsi articulée autour de sujets très diversifiés et a pu montrer que la question des affects numériques touche de nombreuses sphères liées au web... mais pas uniquement. De la configuration des affects contemporains par l'économie numérique, de l'empathie liée au journalisme immersif, de la misogynie à l'ère du numérique, en passant par le capitalisme émotionnel dans les discours de communication d'influence, les limites de "l'émotion" ont été tracées, voire étendues.

Dans ce contexte, Tiffany Andry a présenté sa réflexion sur les liens potentiels entre la dataviz et le design émotionnel, initié par Don Norman (2012). Effectivement, après avoir recensé plus de 65 principes de visualisation de l'information, notamment en parcourant les travaux de Bertin (1967) et Tufte (1983, 1990, 1997), elle a noté leur teneur minimaliste : le "bon" graphique serait un graphique épuré. Face à cela, elle a constaté, comme d'autres auteurs, un penchant pour l'ornementation des visualisations, que ce soit dans les médias ou dans les organisations. Fioritures et décorations ne sont effectivement pas conseillés par les principes relevés... Par ailleurs, Kennedy et al. (2015-2017) ont montré que les gens réagissent émotionnellement aux visualisations de données, en fonction de différents facteurs humains, dont l'ornementation peut faire partie. C'est là que le design émotionnel, pensé prioritairement pour les objets tangibles, entre scène : entre le niveau viscéral (sensation esthétique de base), comportemental (utilisabilité) et réflexif (recul critique), un équilibre idéal permettrait à l'utilisateur de mieux travailler avec un objet dit "agréable"... même s'il est en soi moins efficace. Dès lors, Tiffany Andry s'est demandé dans quelle mesure cette affirmation ne s'appliquerait pas aux ornementations des visualisations de données. Après avoir mené des expérimentations en laboratoire avec des professionnels de la communication numérique, elle a pu présenter ses tous premiers constats. L'ornementation serait vue comme une aide pour les uns, comme un élément agréable absolument nécessaire pour d'autres, tandis que d'autres encore estiment qu'il s'agirait là d'un geste évident de la part de l'émetteur qui prendrait ainsi "soin" du destinataire en lui proposant une lecture plaisante. Ainsi, Tiffany Andry a considéré qu'effectivement, le design émotionnel pouvait s'appliquer à toutes ses notions, parce qu'il ne propose pas une visualisation qui fonctionne mieux en tant qu'objet mais qui prédispose plutôt l'individu à la considérer et à s'engager dans sa compréhension. Pour en savoir plus, la présentation se trouve ci-dessous.

Afin d'en apprendre plus sur les réflexions émises lors du colloque n°421, parcourez le live tweet :